Maxime, souvent bien renseignée sur les visites culturelles à faire dans Paris, nous a organisé une journée de balade sur un thème original : les atlantes et les cariatides.
Que recouvrent ces termes bizarres ?
Un atlante est une statue d'homme soutenant un entablement, un balcon, une frise et une cariatide, une statue féminine.
Ce samedi 15 décembre, nous étions une vingtaine d'abeilles au RDV de 9 h devant l'église de la Trinité, place Estienne d'Orves. Cet édifice construit entre 1860 et 1867 sous le Second Empire s'inspire de la Renaissance française et joue sur la gamme du chiffre trois : 3 arcades, 3 fontaines à triple vasque semi-circulaires, et en surplomb, trois statues allégoriques: la Foi, la Charité et l'Espérance.
Au n°
2 de la place Estienne d'Orves
un bel immeuble qui témoigne d'une belle liberté ornementale avec 2 atlantes sculptés qui encadrent la porte cochère et supportent le balcon du premier étage. L'artiste leur a donné des traits égyptiens.
Nous nous engageons dans la rue de la Chaussée d'Antin, c'est samedi, la circulation nous permet d'évoluer sans trop de contraintes et le soleil nous accompagne. Au croisement avec la rue de Provence un immeuble construit en 1887, présente 2 médaillons sculptés l'un du duc d'Antin l'autre du comte de Provence, une référence à l'histoire du lieu, c'est très à la mode à cette époque d'évoquer les grands hommes. Deux cariatides complètent le décor de la façade, elles soutiennent la corniche du premier étage au dessus de la porte d'entrée et tiennent des fleurs et des fruits.
En croisant le boulevard Haussmann, nous ne manquons pas de jeter un coup d'oeil aux magnifiques vitrines de Noël des Galeries Lafayette.
Au croisement du boulevard des Capucines et de la rue de la Chaussée d'Antin, nous nous arrêtons un moment devant le Gaumont-Opéra construit en 1868 pour être le théâtre du Vaudeville. À l'étage supérieur des cariatides symbolisent la Folie, la Comédie, la Satire, la Musique. Acquis en 1927 par la société Paramount, après d'importants travaux, il est transformé en une salle de cinéma de 1900 places inaugurée le 24 novembre 1927, ce qu'il est encore aujourd'hui sous le nom de Gaumont-Opéra, il comprend 7 salles.
La rue Réaumur fut ouverte entre 1895 et 1896 entre les rues Saint-Denis et Notre-Dame-des-Victoires. Inaugurée en 1897 par Félix Faure, cette rue témoigne d'une profusion de façades très décoratives qui reflète les nouveaux règlements d'urbanisme de la fin du XIX ème siècle (gonflement des toits, autorisation des bow-windows). Les architectes utilisèrent pour la plupart des structures métalliques cachées par des façades en pierre, dans lesquelles ils insérèrent de vastes baies vitrées laissant pénétrer la lumière naturelle nécessaire aux activités du quartier, essentiellement consacrées à la presse et au textile. Plusieurs façades furent ainsi primées au concours annuel d'architecte institué en 1897.
Au 116 rue Réaumur , à l'angle de la rue du Sentier, un immeuble construit en 1897-1898 et primé au concours des façades de la ville de Paris a été commandé par un fabricant de flanelle et de molleton. L'arcade d'entrée est flanquée de deux puissants atlantes soutenant la corniche supérieure et assimilés à la figure d'Hercule. La porte est surmontée d'un fronton orné d'un bas-relief : Diane accompagnée de deux amours.
De l'autre côté de la rue de Réaumur au 101 , à l'angle rue de Cléry, un immeuble tranche avec ses voisins par la puissance de son élévation que couronne une rotonde d'angle à deux niveaux. Deux cariatides néorenaissance habillent la fenêtre du 3 e étage de la proue. Elles s'adaptent sans raideur au style éclectique de l'immeuble.
Ces observations successives nous font progresser assez lentement et Maxime nous accorde une pause, près de la station Sentier, le temps de se réchauffer en dégustant un café très apprécié par la plupart.d'entre-nous.
Au
51 rue Réaumur
un Immeuble d'activités de 1910 formant une tête d'îlot donnant sur la rue de Réaumur et encadré par le boulevard Sébastopol et la rue de Palestro, il est de style néo-baroque avec une rotonde d'angle polychrome et deux énormes coquilles St Jacques en éléments de décoration sous le toit. C'est l'ancien siège des magasins à succursales multiples Félix Potin.
Félix Potin ouvre son premier magasin en 1844, à Paris. Il applique dès lors quatre principes qui seront la clé de son succès : vente à bon poids, produits de qualité, marge bénéficiaire réduite et prix affichés en magasin. Il inaugure, en 1860, la première grande surface sur deux niveaux, boulevard de Sébastopol à Paris. La société possédera des usines et jusqu'à 1200 supérettes dans les années 50 avant sa liquidation en 1996. Actuellement le rez-de-chaussée et le premier étage sont occupés par un Monoprix.
Un peu plus loin nous découvrirons l'entrée du passage du Bourg-l'abbé d'une longueur de 43 m, il permet de passer du 120, rue Saint-Denis au 3, rue Palestro, Il a été réalisé par l'architecte Auguste Lusson en 1828. Les cariatides, sculptées par Aimé Millet en 1863 sont des allégories du Commerce et de l'industrie, symbolisés respectivement par l'ancre, attribut de la marine marchande, et par les pièces de machines. Le cartouche est garni d'une ruche, emblème de l'activité économique.
L'heure du repas approche, Maxime nous a préparé une surprise, elle a réservé dans une brasserie au nom approprié : "le vélocipède" où Gérard nous rejoint. Sur notre chemin, nous ne manquons pas de jeter un coup d'oeil aux bâtiments du Conservatoire National des Arts et Métiers (CNAM) qui abritent également le musée des Arts et Métiers. Ces lieux sont connus pour les cours de formation tout au long de la vie professionnelle pour des milliers d'élèves motivés à poursuivre des études tout en travaillant. Plus de 8000 titres et diplômes délivrés par an et plus de 1000 validations des acquis de l'expérience sont acceptées par an.
Le restaurant dispose de suffisamment de place pour nous accueillir tous. Nous nous regroupons en petits groupes. Les 5 plats du jour au choix sont abondants et appétissants. C'est servi rapidement, c'est un peu cher mais la qualité et le service sont très corrects.
Nous pouvons reprendre nos déambulations vers 14h en nous arrêtant un moment à l'arc de triomphe de la Porte de St Denis . Érigé en 1672, aux frais de la ville pour célébrer les victoires de Louis XIV sur le Rhin : 40 places fortifiées conquises en moins de deux mois. Sur les deux faces sont plaquées des pyramides décorées de remarquables trophées et en haut de la porte, côté ville, un haut-relief représente le Passage du Rhin et côté faubourg c'est la prise de Maastricht.
Un peu plus loin le théâtre de la Renaissance apparaît pour la première fois sous la forme d'une compagnie théâtrale fondée en 1838 par Anténor Joly sur l'initiative de Victor Hugo et Alexandre Dumas, qui souhaitaient disposer d'une troupe dédiée à leurs drames romantiques. En 1872, sur les plans de l'architecte Charles de Lalande, un nouveau théâtre à l'italienne est construit sur l'emplacement d'un restaurant incendié durant les combats de la Commune de Paris. L'inauguration a lieu le 8 mars 1873, La façade en pierres de taille, précédée d'un petit parvis, est divisée en trois étages et autant de travées. Les trois arcades surmontés de mascarons sont encadrées par quatre piliers sur lesquels sont sculptés des couples de cariatides engainées qui portent le balcon de l'étage-noble. Celui-ci présente un portique corinthien aux colonnes géminées. La corniche comporte l'inscription Théâtre de la Renaissance. Le dernier niveau, en retrait, est entouré d'une balustrade, sur laquelle deux statues allongées tiennent un blason où l'on lit la date 1872. Au dessus, le toit à pans brisés est couvert en ardoise, et percé de lucarnes. Sa capacité actuelle est de 650 places.
Nous sommes dans le quartier des théâtres avec à proximité le théâtre de la Porte St Martin . Il fut construit pour accueillir l'Académie royale de Musique dont la salle du Palais-Royal venait d'être incendiée. Il est inauguré le 27 octobre 1781. Lorsque l'opéra réintègre sa nouvelle salle de la rue de Richelieu le 9 thermidor an II, le théâtre est fermé et la salle utilisée pour des réunions politiques jusqu'en 1799, date à laquelle il est vendu comme bien national. Le 30 septembre 1802, la salle rouvre en tant que théâtre. Incendié le 25 mai 1870 pendant les événements de la Commune de Paris, il a été reconstruit sur le même emplacement avec le nouveau décor de la façade notamment des figures symbolisant la Tragédie, le Drame et la Comédie. Le théâtre rouvre ses portes le 28 septembre 1873. Dix ans plus tard, la grande Sarah Bernhardt s'y produit, elle y reste fidèle jusqu'à la fin du siècle. Le 27 décembre 1897 y est créé le Cyrano de Bergerac d'Edmond Rostand.
Nous restons dans les théâtres avec le théâtre du Gymnase Marie-Bell situé au 38, boulevard Bonne-Nouvelle. Inauguré le 23 décembre 1820, il dispose de plusieurs salles et peut accueillir 800 spectateurs. L'éclairage au gaz fut installé dès 1823 par les bonnes grâces de la duchesse de Berry. Fermé en juin 1830 pour rénovation, le théâtre reprit, après la révolution de Juillet. La tragédienne Marie Bell prend la direction en 1962; elle interprète notamment une Phèdre particulièrement marquante. Elle dirige le théâtre jusqu'à son décès le 15 août 1985.
Le Grand Rex
ensuite, boulevard Poissonnière. Ses façades et toitures, ainsi que la salle et son décor font l'objet d'une inscription au titre des monuments historiques en 1981, échappant alors de peu à la destruction. Ce cinéma géant peut accueillir plus de 2 700 personnes dans sa configuration actuelle et affiche, encore aujourd'hui, une fréquentation de 1,25 million de visiteurs annuels.
Au début des années 1930, Jacques Haïk, riche producteur et distributeur dans le cinéma, se lance dans la construction d'une salle de cinéma complètement extravagante qui pourrait accueillir plus de 5 000 spectateurs sur une superficie de 2 000 m
2
, avec un plafond culminant à plus de 30 m, représentant une voûte étoilée. Le cinéma est surtout connu pour sa décoration intérieure. Spécialisé dans les "salles atmosphériques".
La salle du Grand Rex ouvre ses portes au soir du 8 décembre 1932 et connaît un succès immédiat. C'est l'une des plus belles salles de Paris. Des jeux d'eau animent la grande salle chaque année à Noël depuis 1954, la "féerie des eaux", peu avant la projection du film Disney de fin d'année.
En 1974, trois petites salles ont été ajoutées au complexe, à l'emplacement des loges, salles de répétition etc.., et le Rex Club, remplace le dancing "Rêve". En 1988, le Grand Rex s'offre le plus grand écran de France, le "Grand Large", 300 mètres carrés, ce qui en fait le plus grand cinéma d'Europe. Le "Grand Large", conçu et réalisé par Luc Heripret, est inauguré par Le Grand Bleu de Luc Besson, qui remplit la salle pendant trois ans.
Nous suivons le boulevard Poissonnière et sur notre droite, au bout de la rue Rougement, nous apercevons la belle façade de l'ancien siège social de la BNP-PARIBAS et un peu plus loin sur le boulevard des Italiens, le Crédit Lyonnais.
Le théâtre des Variétés
est une salle de spectacles située au 7, boulevard Montmartre dans le 2
e
arrondissement de Paris. Inauguré en 1807, c'est l'un des plus anciens théâtres parisiens encore en activité. Il a été classé monument historique en 1974. Le théâtre des Variétés doit sa création à Marguerite Brunet, dite Mlle Montansier. Déjà propriétaire d'un théâtre à Versailles inauguré en 1777, elle profite de la Révolution pour s'installer à Paris en 1790 et prendre possession du théâtre des Beaujolais, sous les arcades du Palais-Royal, qu'elle rebaptise "Variété-Montansier" puis tout simplement "Variétés". Mal vue par le nouveau régime, elle est mise en prison pour dettes en 1803, avant qu'un décret n'ordonne, le 1er janvier 1807, l'évacuation de sa troupe dont le succès porte ombrage au Théâtre-Français voisin..
Reçue par l'Empereur, Mlle Montansier obtient, à 77 ans, son aide et sa protection. À la tête de la société des Cinq, elle fait édifier une nouvelle salle sur les boulevards près du passage des Panoramas.
Nous terminons cette journée de découvertes de richesses ornementales et architecturales d'un quartier de Paris "très XIX e siècle" par quelques façades d'immeubles où le métal et la pierre sont associés avec goût. Cette journée organisée et commentée par Maxime nous permettra de circuler autrement dans Paris en étant plus attentifs aux façades et aux décorations des immeubles qui sont tous l'expression de cette époque où les sciences, les arts, l'architecture et l'économie franchissaient une étape capitale après la révolution.
Merci Maxime de nous faire découvrir et aimer un peu plus Paris.
Henri Courmont
"Le Cyclotourisme, un art de vivre" |
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